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Créations autour de Julien
19 février 2011

[Lire avec en bande-son, peut-être, le Prélude de

[Lire avec en bande-son, peut-être, le Prélude de Bach live Club Med Palavas 1993, grandiloquent et ridicule avec une pointe de nostalgie]

J'ai prononcé ton nom entre l'oreiller et le drap, tout bas, sans réfléchir, presque sans faire exprès. J'étais seule dans le lit, la chambre était froide comme toujours le soir, mes pieds n'avaient que le périmètre de la bouillotte pour ne pas geler. Au bord du sommeil, j'ai juste chuchoté, presque sans bouger les lèvres, dans un souffle.
Julien...
J'ai été surprise comme si quelqu'un d'autre avait dit ce mot dans mon oreille. Comme si, aussi, je découvrais ces sonorités douces, comme si c'était la première fois qu'elles passaient dans ma bouche. J'ai recommencé.
Julien...
Je me souviens, tu étais si proche de moi, avant. Tellement proche, à te sentir bouger entre ma peau et mes muscles, à ressentir les gestes que je te voyais faire. Tu t'es éloigné peu à peu, j'ai senti se tendre le lien entre nous, au niveau du plexus solaire. Je ne l'ai pas senti se rompre.
J'ai voulu tant de choses avec toi, j'ai tout voulu, tout désiré. J'ai souhaité ton amitié, ton amour, j'ai voulu caresser ton corps, me fondre en toi jusqu'à devenir une parcelle de ta matière, j'ai voulu devenir toi pour mieux te comprendre. Finalement je suis devenue moi davantage, c'était sans doute ce que, toi, tu aurais pu souhaiter, si tu avais voulu quelque chose pour moi.
Je ne sais plus si ces désirs-là sont éteints, ou simplement en attente. Je ne les ai plus ressentis pour personne après toi. Je ne crois pas qu'ils soient morts, sinon je serais sans doute morte avec eux. Mais depuis que ton image tapisse l'intérieur de mes paupières, de jour comme de nuit, je ne me suis jamais sentie si vivante, comme ce lien à la fois passé et si présent.
Quintessence, révélateur, jumeau, j'ai tout dit, tout pensé à ton propos. L'énigme reste entière, irrésolue. La même oppression dans la poitrine réapparaît en même temps que toi, familière. Mais je n'identifie plus ce manque, et là dans mon lit je m'interroge. Au bout de toutes ces réflexions, tous ces écrits, toutes ces théories, pensées et ressassées, il reste la chair à vif de ne pas te toucher, quelque chose de primitif et d'implacable comme la paume qui se plaque sur la peau tuméfiée pour soulager la douleur.
Je ne veux pas que tu me regardes, je ne veux pas que tu m'écoutes, je veux cette relation à sens unique telle qu'elle a toujours été. Te caresser sans t'atteindre, mordre dans ton épaule sans rien marquer. Que la seule réalité soit la vibration de l'air entre mes lèvres... Julien... c'est.

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