Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Créations autour de Julien
7 mars 2008

Julien, pardon si je t’ai menti mais c’est bien mieux ainsi !(3ème partie)



« Julien, pardon si je t’ai menti mais c’est bien mieux ainsi ! »

3ème partie

Le petit matin pointe maintenant le bout de son nez, j’ai arrêté de vouloir fuir et j’ai « fondu » de sommeil entre tes bras, c’est la première fois que je dors comme un bébé près d’un homme que je ne connaissais pas la veille, accumulation de non-sens, j’ai arrêté de vouloir comprendre pourquoi tout est si simple avec toi et si compliqué, impossible avec les autres, cela restera à jamais le plus grand paradoxe de notre éphémère mais intense relation !
Julien, l’homme miracle, rencontré bien trop tard, tu ne le sauras jamais mais j’ai entrepris un voyage dont on ne revient pas, j’ai rompu tous les ponts avec le bonheur, je vis pour ne pas mourir mais j’ai oublié qu’il y a plaisir à vivre et même toi, mon cher trésor, inespéré, inattendu, oui même toi, tu n’y peux strictement rien changer ! Tout est déjà écrit avant même d’avoir été vécu, je suis un ion négatif et tous mes sourires ne cachent plus ma profonde détresse, je peux encore me mentir un peu à moi-même mais déjà plus du tout à toi.
Tu me serres un peu plus fort, je sais que tu respires mon odeur qui oscille entre la vanille et le bébé (finalement très loin de mes pensées funestes), tu caresses mes cheveux dont la douceur et la blondeur te plaisent, tu fais nonchalamment rouler et dérouler l’une des mes mèches entre tes doigts, tu apposes un baiser léger sur mon épaule, tu n’es que tendresse, te quitter et te mentir une fois encore, va être un vrai déchirement mais il le faut, il le faut vraiment !
Je me tourne alors vers toi, tout en m’étirant : « Bonjour, Julien »
Toi, en mode sourire : « Bonjour, ma belle dormeuse »
Moi, en demi-soupir : « J’ai vraiment dormi ? »
Toi, si heureux : « Comme un bébé ! »
Moi, finalement sincère : « Avec toi, je me sens si bien, comment fais-tu ? »
Toi, dubitatif : « Je n’ai pas d’explication, c’est simple, cela vient d’emblée, cela s’impose comme une évidence ! »
Moi, limite impertinente : « Oh, c’est donc ça ton secret, tu crois avoir percé tous mes mystères ? »
Toi, pensif : « Non, bien sûr que non, ce serait trop simple mais peut-être quelques-uns, tout de même ! »
Moi, n’aimant pas trop ça : « Alors, juste quelques-uns »
Toi, sourire en coin : « Oui, quelques-uns, c’est cela ! »
Moi, faussement rassurée : « Merci de ta prévenance »
Toi, contemplatif : « Avec plaisir ! » et là tu apposes tes lèvres sur les miennes, ton baiser est un monde de douceur dont on voudrait que chaque matin soit enrobé. Moi qui suis toujours d’une humeur nauséeuse et maussade le matin, là je me sens légère et en joie, j’ai de grand matin envie de toi, j’en ai presque honte, tu sens poindre mon désir.
Moi, un peu confuse « Je…, j’ai honte, je te désire encore, mais que m’as-tu donc fait ? »



Toi, dans un murmure : « Rien que de donner un peu de bonheur à ta vie, tu sais cette vie à qui tu refuses si souvent la place aux joies simples ! »
Moi, à mon tour en mode sourire : « Mon inconnu au bonnet de magicien ? »
Toi, hilare : « Oui, un peu quelque chose comme ça ! », « Alors, encore envie mais vraiment envie ? »
Moi, juste un peu penaude : « Oui, vraiment envie et j’ai toujours honte ! »
Toi, adorable : « Oh, il ne faut pas et puis tu n’es pas la seule à avoir envie, j’ai eu envie à chaque seconde où je t’ai regardé dormir, j’ai failli te réveiller jusqu’à en être honteux, tu dormais si bien ! »
Moi, enfantine « : A chaque seconde ? »
Toi, en mode absolu désir : « Viens-là, jolie Léa ! »
Je vais alors avoir droit à la plus jolie définition d’un petit câlin du matin par l’entremise de tout ton être, à chacun de tes élans et désirs, je vais répondre de plus en plus gourmande et sans pudeur. Qu’il est bon de ne rien craindre, de ne rien redouter, de s’abandonner à l’autre, de croire que quelques minutes d’intense bien-être pourront combler le vide et l’éternité d’une vie ratée, oui c’est si bon !
Après un léger flottement dû à l’envie de rester dans les bras l’un de l’autre, tu me proposes alors : « Je prépare un petit déjeuner, ça, je sais faire ? »
Moi, toujours affamée : « oui, merci,…. Julien ? »
Toi : « Oui ? »
Moi : « Merci »
Toi, interrogatif : « De quoi ? »
Moi, plus que reconnaissante : « D’être Julien, de m’avoir offert, tout ça ! »
Toi, voulant comprendre en détail : « Tout ça, quoi ? »
Moi, presque pudique : « Ta tendresse, ta prévenance, le fait qu’un homme puisse être autre chose que de la souffrance »
Toi, aimant ce que tu as entendu : « Ah, alors c’est bien, si j’ai pu servir à quelque chose et surtout si tu en es persuadée »
Moi, à nouveau mutine : « J’ai toujours faim ! »
Toi faisant mine de se presser : « Ok, ça vient, madame, ça vient ! »
Tu te lèves et quelques mètres plus loin dans la pièce, posé sur la table, tu découvres mon dessin.
Toi, regardant le croquis : C’est moi à l’évidence, c’est magnifique, t’as vraiment un don mais je ne m’étais pas rendu compte que tu me croquais »
Moi, désirant savoir : « Il te plait vraiment ? »
Toi, enthousiaste : « Oui, plus que ça, je peux l’avoir ? »
Moi, contente pour toi : « Oui, bien sûr, il est à toi ! »
Toi, insistant : « Tu as un putain de talent, c’est pas juste de cacher tes dessins et tes écrits dans tes tous petits carnets ! »
Moi, tout aussi déterminée : « Si, c’est juste, toi, tu es un être de lumière, tu vas les éclabousser de ton talent et moi, je suis un être de l’ombre et c’est très bien ainsi ! »



Toi, toujours insistant : « Je ne désespère pas de te convaincre ! »
Moi, dodelinant de la tête : « Essaye, l’espoir fait vivre ! »
Toi, presque philosophe : « Oui, je vais m’y employer les jours qui viennent… »
Moi, faussement résignée : « Oui, je n’en doute pas…. Mais là, j’ai toujours faim ! »
Toi, riant : « Oh, doucement, ça vient, ça vient ! »
Le petit déjeuner servi, et fort appréciable ma foi, nous partageons là encore un tendre échange.
Toi, tout en grignotant à peine : « Tu as fort bel appétit »
Moi, dans mes nuages : « L’amour sans doute… pardon ça m’a échappé ! »
Toi, interpellé : « Echappé ? »
Moi, très gênée : « Oui, pardon… »
Toi, pas décidé à me lâcher ainsi : « Non, tu l’as dit et c’est bien ainsi ! »
Moi, cramoisie : « C’est pas le deal ! »
Toi, vaillamment : « Mais, il n’y a plus de deal »
Moi, très stupide : « Tu triches ! »
Toi, presque offensé : « Non, je n’ai triché à aucun moment mais de là vient peut-être tout le problème, la pression que tu te mets soudain dessus »
Moi, du profond de mon ressenti : « c’est pas juste, tu incarnes la vie et moi…
Toi, m’interrompant : « Toi, tu essayes désespérément de faire croire que tu es déjà morte mais avec moi, ça ne marche pas, je te rendrai à la vie, j’arriverai à te faire aimer la vie… j’y arriverai et ce bien malgré, toi ! »
Moi, timorée : « Mais, j’aime la vie, juste pas la mienne … »
Toi, certain pour le coup : « Avec moi, tu vas apprendre à aimer ta vie, crois-moi ! »
Moi : « Je te crois », et un mensonge de plus…
Toi, pas dupe du tout : « Pas, encore, mais ça viendra, ça viendra ! »
Moi : « Julien ? »
Toi : « Oui ? »
Moi, devant te le dire : « Je ne pourrai jamais te rendre tout ce que tu m’as offert, hier, cette nuit, ce matin, cette journée… »
Toi, plein d’espoir : « Mais si, on va se donner du temps et tu y arriveras, tu verras, cela va être si simple de me rendre heureux, si simple »
Moi, toujours en plein brouillard : « Tu crois ? »
Toi, un sourire en bandoulière : « J’en suis persuadé ! Là, mange, faudrait pas que nos discussions te coupe l’appétit, mange, ma douce ! »



Là, il m’a promis un miracle et pour la première fois, s’il me disait qu’il marche sur l’eau, je serais presque prête à le croire ! Julien est un homme dangereux mais il ne connaît pas encore l’étendue de son pouvoir, pas encore, mais les hommes changent, se gâtent… oh, mon dieu, donnez-moi la force de lui mentir encore un peu !
En ce début de journée, je sens Julien d’humeur plus que jamais romantique, fleur bleue à souhait, il choisit alors de mettre un fond de musique et me demande, si j’aime danser.
Moi, hyper troublée : « Oui, j’aime beaucoup danser »
Toi, presque certain de la réponse : « J’en étais sûr ! »
Moi, étonnée : « Pourquoi ? »
Toi, heureux que je te le demande : « La façon dont tu fais l’amour »
Moi, désireuse d’en savoir plus : « Ah, oui ? »
Toi, dans ton explication : « Tu es à la fois très féline et très câline, de même lorsque tu te déplaces ou lorsque tu utilises tes crayons, c’est toujours très magnétique, ton corps épouse alors parfaitement les contours de la vie, et j’aurais alors été très étonné que tu n’aimes pas danser puisqu’un feeling puissant émane de ton corps permettant aisément de supposer que tu dois aimer glisser sur la musique, suis-je clair ? »
Moi : « Oui, tout à fait clair…, alors nous dansons ? »



Tu t’approches de moi, arrête le fil du temps tout en me regardant et le suspend au bord de tes envies, me demande de te laisser faire, tu places ma main dans la tienne, presque religieusement, glisse la seconde dans le bas de mon dos et nous symbioses dans une position où nous abordons encore un nouveau langage, un autre rivage sacré. Je respire alors ton odeur du matin, entre ambrée et grillée, oui, une partie de toi sent le pain grillé, finalement juste suffisamment pour que j’ai envie de te déguster, de me délecter de mon petit toast improvisé ! Délicieuse mise en bouche qui m’invite à poser ma tête sur ton épaule, prémices subtiles dont je sais qu’à nouveau tu vas m’emporter. Par le simple fait d’être dans tes bras, de sentir la mouvance de ton corps qui est immanquablement à l’écoute du mien, je flotte à nouveau dans l’air, je suis dans une bulle de douceur bien à l’abri de tout ce qui n’est pas toi. Ta voix dépose des paroles improvisées sur la musique, tu m’ensorcelles par des filtres dont la magie est très puissante, ta douceur jamais démentie me berce mais nous le savons, nous le sentons, le désir n’est jamais bien loin ! Machinalement, ta main caresse ma main, chacun de nos échanges est fièvre, je sens que nos corps se répondent de plus en plus, je n’ai pas le courage de mettre fin à cet instant de grâce. Tu vas encore m’ouvrir d’autres horizons et je vais me laisser faire, en l’état me refuser à toi tiendrait autant de l’hérésie que d’une grande cruauté ! Et tu es bien le dernier humain envers qui je désire faire preuve de la moindre pointe de méchanceté. Tu es si loin de « l’ange noir », cet homme qui m’a détruit et qui me hante depuis l’âge de mes dix-huit ans, tu es si fort de ta douceur, si serein au milieu des orages, que ne t’ai-je aimé lorsque j’étais encore pleine d’espoir et d’attente envers la vie. C’est si horrible à admettre mais tu arrives bien trop tard. Nous allons nous aimer là, pour la dernière fois et je peux bien dire aimer, ce que nous nous offrons n’a d’ailleurs jamais rien eu à voir avec de la « baise », le terme me paraît si sale, si veule en regard de toutes tes tendresses, toutes tes douceurs que tu m’as offertes et m’offres encore. Tes baisers vont me hanter très longtemps mais pour la première fois, ce qui va me hanter sera un monde, un océan de douceur, et tes mains, comment encore toucher un homme après toi sans songer à quel point, tu as donné sans rien attendre et tu as tout reçu en retour, mon esprit t’a menti et s’est menti à lui-même mais jamais mon corps, il a épousé de suite les contours du tien, une osmose sans pareille qui m’a prouvé alors qu’aveuglée par mes orages, qu’il existait bel et bien encore des îlots de paix et d’amour. Il m’arrive certains jours de me demander encore, si j’ai été lâche, si j’ai eu peur pour toi ou pour moi, si j’avais peur que « l’ange noir », cet horrible passé trouble prenne un malin plaisir à te faire souffrir en te prouvant à quel point j’étais encore après tant d’années sous son emprise et non digne de respect par là, si j’étais par trop fatiguée mentalement ou physiquement pour bien comprendre à quel point tu étais rare et précieux, si j’avais la préscience de ce qui allait balayer à tout jamais tous mes doutes et mes angoisses et changer radicalement ma perception de la vie mais ce qui est certain, c’est que tu restes cher à mon cœur pour tout ce bonheur offert sans autre but que d’être donné. Aujourd’hui encore tu vis en moi comme en ceux qui t’ont aimé, tu nous as fait le cadeau de ta vie, une pluie d’étoiles qui illuminent chacun de nos jours et de nos nuits !



Il est maintenant près de midi, nous avons choisi de dîner dans un charmant petit bistrot, pour la première fois, je te sens nerveux, presque anxieux mais tu sais te faire violence, je sais que tu pressens mes hésitations, mes conflits mais tu sais aussi que les aborder va nous plonger dans le chaos, à nouveau tu prends sur toi, nous échangeons nos impressions sur nos dernières lectures et nous avons l’intention de nous rendre à une foire du Livre qui avait retenu mon attention au travers de publicités. L’idée t’enthousiasme, nous avons de fait beaucoup de goûts en communs. Le temps s’égrène au mépris de l’angoisse que j’ai maintenant de te quitter et à la peur immense que j’éprouve d’un monde où tu ne seras plus là pour me dire que je suis jolie, importante, désirable et que ma vie a le droit de revendiquer sa part de bonheur. Je le sais autant que je le redoute mais tout à coup, un monde sans toi ne me dit plus rien, que vais-je y faire ? A quoi bon vivre sans plaisir de vivre, treize ans, que je me pose cette question et la première fois où j’en ai la réponse, celle-ci s’impose limpide : « Cela ne sert à rien ! »
La fin de l’après-midi arrivera bien trop vite à ton goût tout comme au mien d’ailleurs, je dois maintenant te quitter, rentrer à l’hôtel, dire au revoir aux amis et fuir, fuir, vite, loin, très loin !
Toi, pas en très grande forme : « Alors, on se retrouve dans une heure, au bistrot où on a bu notre premier café ? Tu viendras ? Tu vas pas me faire faux-bon ? »
Moi, très mauvaise comédienne : « Oui, je viendrai ! »
Tu préfères ne plus insister mais tu en meurs d’envie, tu me prends alors dans tes bras, nous sommes dehors, il a enfin arrêté de pleuvoir, des gens passent et repassent indifférent à notre peine, à notre trouble.
Toi : « Viens-là, que je sente encore ta douce odeur de bébé »
Moi : « On se retrouve dans une heure, ne soit pas triste ! »
Toi : « Pardon de ce mélodrame, mais pour être sincère, mon instinct me dit que je te vois peut-être pour la dernière fois, avant longtemps »
Moi, désireuse d’abréger mes souffrances et mes mensonges : « Embrasse-moi, oui, embrasse-moi, Julien ! »



Notre baiser a le goût d’une soif qui sera longue, très longue avant que d’être encore étanchée, ta bouche est plus gourmande que d’ordinaire, tu m’en fais presque mal mais je te donne toute mon intensité, tout mon amour en un seul baiser, ta langue est exigeante comme elle ne l’a jamais été et je me sens au bord des larmes, je viens de tomber amoureuse en à peine 24 heures et je ne sais comment y faire face.
Ma seule réponse sera comme toujours mon sport national favori : la fuite en avant, sport que je pratique de haute lutte et où je remporte médailles sur médailles mais ces victoires que je tresse autour de mon cou comme des lauriers futiles, m’enserrent et m’étouffent aujourd’hui comme jamais.
Je t’aime Julien mais je te quitte, je t’aime mais je ne serai pas au rendez-vous, je t’aime et quelque part, j’en crève petit à petit… alors que paradoxalement je n’ai jamais été plus en vie qu’à cet instant précis !
Je vais trouver le courage de te laisser là sur le trottoir, je reprends de tes mains, ma petite valise et lorsque je vais tourner l’angle de la rue, mes yeux inondés de larmes, je tente encore d’apercevoir ta silhouette et une dernière fois, je te fais un petit signe de la main.



J’arrive enfin à l’immeuble toujours en larme, entre dans la cour, passe par une série de venelles et rejoins enfin mes amis, que je vais saluer au plus vite, trop vite sans doute car lorsque j’arrive à la gare, je m’aperçois, chose qui ne m’arrive jamais que j’ai oublié ma pochette de voyage avec mon ticket de train, mon passeport et mes clefs. Il me faut retourner chez mes amis ou y renoncer, bref je fais le choix de retourner sur mes pas, nous sommes alors à peu près une heure et demi plus tard lorsque je reviens à l’immeuble, énervée, fatiguée, limite enrhumée et toujours les larmes aux yeux. Je l’ignore encore mais je vais vivre là trois des heures les plus pénibles que j’aurai jamais à vivre.
J’ai alors un réel coup au cœur, ma respiration tient de la panique la plus totale, tu es là devant l’immeuble, je n’ai qu’une fraction de seconde pour échapper à ton regard qui cible les alentours, je te sens frustré et soudain toi aussi très fatigué, tu observes puis pousses la porte de l’immeuble, tu sembles, ce qui me paraît, un temps infini, examiner toutes les sonnettes à la recherche de mon nom, sans doute, force m’est reconnaître que tu m’as donc suivi sûr et certain de mon ultime mensonge. Mais au travers de mon angoisse et de mes remords perce aussi le sentiment trouble qui gicle dans mon cœur de femme, tu es amoureux ou tout du moins, tu agis comme tel, sinon ta présence n’aurait aucun sens. Je vais également voir que tu m’as dérobé l’une de mes photos, celles que je t’avais montrées et qui étaient dans ma valise, j’ai de plus en plus honte, je t’ai poussé dans tes retranchements, connaissant ta droiture, tu n’as pas dû apprécier de me voler cette photo, tu interroges à présent le concierge mais tes espoirs ne semblent pas satisfaits.



Ta frustration fait maintenant visiblement mal à encaisser, tu t’entêtes, questionnes toutes les personnes qui rentrent dans l’immeuble, inlassablement les mêmes mots doivent franchir ta bouche, celle-là encore si chaude, si chère à mon cœur, je pleure maintenant à chaudes larmes, mais ai-je vraiment arrêté depuis que je t’ai quitté ! Rien dans tes investigations ne va déboucher sur du concret, une heure, deux heures et tu ne sembles toujours pas prêt à renoncer, une voiture s’arrête à ton niveau, un ami sans doute, étonné de te trouver là, tu lui expliques sans doute la raison de ta présence, il se gare et une heure va encore défiler, infructueuse, ton humeur est sombre, tu es déçu, dépité, blessé sans doute mais je m’efforce de croire que cela te passera et puis tes activités artistiques vont reprendre le dessus, quelques jours et je ne serai plus qu’un mauvais souvenir. Ton ami te parle, te pousses à renoncer, tu fulmines mais tu abdiques aussi, tu t’assieds sur le siège passager, trempé grâce à la pluie qui a recommencé ses basses besognes. Je me sens très coupable d’être la cause de ton mal et je garderai longtemps en mémoire cette dernière image de toi, maintenant noir de colère. Voilà, Léa, tu as encore pourri quelqu’un, tu as encore blessé, menti, triché mais pour la première fois, un homme, Julien a ouvert une brèche dans ton cœur de pierre et pour la première fois, tu souffres autant que cet homme parce que toi, aussi tu l’aimes ! Julien qui a toujours su que je mentais mais qui s’est imposé de respecter même mes mensonges, enfin autant que faire se peut quand on est mort de trouille de perdre l’être auquel on commence à s’attacher bien trop.



Trois semaines se sont maintenant écoulées, ton visage n’a pas cessé de me hanter, ma famille me trouve peu bavarde, peu en appétit, je me suis refermée comme une huître, dès que mes proches, maman ou mes amis me questionnent, j’en deviens agressive, j’ai mal et plus rien ne m’intéresse en dehors de la culture intensive de mes regrets. Je vis comme un robot, comme une machine en accomplissement d’actes mécaniques, j’en viens presque à oublier que je détiens la clef de ma propre prison, qu’elle est là au bout de mes doigts, je n’ai qu’à lui téléphoner, lui écrire, enfin faire un petit geste mais rien, je me nourris juste de mon aptitude à souffrir et à faire souffrir. Je sens en valeur absolue que je mériterais que le ciel s’abatte sur ma tête, je ne l’aurais pas volé !
La première lueur d’échapper à mes remords se présente sous la forme d’une exposition de sanguines, mes belles faiblesses vont sûrement pouvoir me rendre le sourire, il s’agit d’une soirée exceptionnelle, j’ai même entendu dire qu’on pouvait leur confier une œuvre pour qu’il la jauge et la propose à la vente.



Je repense alors à Julien qui semblait affirmer que mes sanguines méritaient mieux que l’ombre alors pourquoi pas, j’ai réalisé au moins cinq à six sanguines d’égales valeurs de toi, mon bel amant d’une nuit, que je sens comme une symbolique liée à tout cela, j’en choisi une, voilà celle-là c’est décidé et je la proposerai au galeriste, je verrai s’il tente de concrétiser ou non.
J’espère passer une bonne soirée, me changer les idées, ce sera très loin d’être le cas !
J’ai le corps fatigué, je suis minée par un mauvais rhume, souvenir d’une journée à Paris sous la pluie et j’y ajoute en prime un voile blanc sur l’œil droit, qui m’inquiète à peine et pourtant il ne sera hélas pas anodin.
J’arrive donc tout heureuse à la galerie, je propose ma sanguine qui retient d’emblée l’œil d’un pro qui m’en propose un prix immédiat mais je souhaite temporiser et je demande si on peut l’exposer dans un magasin et voir ce que cela donnera, je veux savoir s’il s’agit d’un coup de cœur isolé ou si j’ai un réel talent, j’ai attendu si longtemps maintenant je veux savoir, et puis voir partir en des mains étrangères mon premier bébé ainsi livré à la vie sans moi, me fait mal, je suis une idiote patentée et une sinistrose romantique. J’ignore bien sûr qu’avec cette décision, j’influe sur mon futur (mais cela est une autre histoire que je ne vous conterai pas ici).
Alors que je vais m’adonner à ma passion, contempler, crayonner, poétiser, m’imprégner du ressenti de l’artiste et enfin goûter à un peu de paix depuis trois longues semaines, ce dans le petit coin tranquille que je me suis choisi, j’entends une voix que je reconnaîtrais en mil, la tienne. Julien, l’homme que je n’arrive pas à oublier, est là, tu es là et moi qui croyais que cette soirée me permettrait d’y voir un peu plus clair. A présent, je déguste mon mensonge jusqu’à la lie, de l’expression avoir le cœur au bord de la bouche, je prends le plein message, si je n’y prends garde, je vais finir par m’évanouir, tout cela est pathétique, je suis pathétique !
Tu es là, beau et élégant dans un costume gris noir, mi-stylé, mi-décontracté, accompagné visiblement par un ami mais que fais-tu là ? Je n’ai alors qu’une fraction de seconde pour échapper à ton regard mais si le supplice visuel devant l’immeuble, il y a trois semaines, ne m’a pas suffit, je vais alors goûter à un autre supplice, par l’entremise de mes oreilles.
Est-ce un hasard, je vais vite constater que non, tu es nanti de la fameuse photo dérobée et de ce que je devine aisément être la sanguine que je t’ai offerte, tu es à ma recherche et force m’est de constater que tu es un fin limier, que le peu que je t’ai dit de moi, tu l’as enregistré et cela n’a pas manqué de bien t’aider à me pister.
Compte tenu de la situation, avoir le cœur qui bât la chamade plus par désir de toi que par peur, doit certainement tenir de la débilité mentale profonde, mais je l’avoue, tu me tournes les sens malgré la fatigue que je lis sur ton visage et des cernes plus dessinés encore qu’à l’accoutumé comme si le sommeil semblait s’être refusé à toi depuis un petit bout de temps, j’ai dû t’en faire voir de toutes les couleurs, j’ai honte, je me hais mais pourtant je continue à me terrer comme un lapin.
Tu vas alors sans le savoir te rapprocher de moi, et les brides de conversation que je vais capter, vont me faire comprendre que je dois fuir au plus vite, tu brûles, une question, la photo et la sanguine face au galeriste et tu fonds sur moi, je n’aurai que quelques secondes pour sortir et partir lorsque tu iras trouver notre hôte dont tu tireras sans peine toutes les informations dont tu auras besoin.
Je t’entends alors t’interroger sur ce que je peux bien fuir ainsi, qui et pourquoi, tu es étonné que je ne sois pas là, en regard de mon amour pour les sanguines, tu préviens ton ami que tu va passer la soirée à investiguer, qu’il doit être patient, tu es venu de Paris, c’est pas pour renoncer face aux premières réponses négatives que tu reçois, ton ami te répond qu’il comprend mais que si je fuis, c’est que cela doit être très important, tu lui réponds que même si j’avais tué le pape cela n’y changerait rien, que tu es amoureux et que tu veux si nécessaire m’offrir ton aide et vivre cette tempête avec moi !
Viendra alors cette petite possibilité de m’enfuir et je la saisirai, si cela devait être à refaire, et connaissant aujourd’hui ce qui restait encore là, mon futur, je n’aurais pas agi ainsi mais on ne peut changer son passé…



Deux jours plus tard, je prends alors la décision de t’écrire, je sens que je te le dois en regard de ta souffrance et du droit que tu as de tourner cette page sereinement, je vais alors tout t’expliquer ce qui me ronge depuis l’âge de mes dix huit ans, l’homme qui m’a mis en miette, une vie gâchée, une fuite de tous les jours, bref, je ne vais rien t’épargner du sordide et du pitoyable de ma vie, je vais t’avouer que j’étais devant l’immeuble et à la galerie, je veux que tu passes à autre chose, je sais que tu mérites bien mieux que moi, même si je ne peux nier que je t’aime aussi, là j’aurais pu ou dû te mentir mais je trouve qu’en matière de mensonge, j’en ai déjà assez fait comme cela, je vais juste taire mon identité réelle. Pour le reste, tu sauras tout et après tu seras parfaitement armé pour m’oublier. Et une fois, pour toute, je resterai Léa Dorane, celle que tu as fait vibrer de tout son être lors de notre unique rencontre. Cette lettre sera postée par une amie de passage en France, ce afin que tu arrêtes de jouer au fin limier.
Le samedi suivant, mon œil droit va à nouveau se recouvrir d’une plaque blanche et opaque juste avant que je fasse un accident vasculaire cérébral des plus sévères alors que l’on m’emporte dans l’ambulance et que maman me tient la main, je suis heureuse de t’avoir dit la vérité, heureuse t’emporter ton visage au milieu de l’amour, heureuse aussi pour la première fois de ne pas t’avoir mêlé à cette nouvelle épreuve qui m’attend et puis alors que j’ai le crâne qui explose sous la douleur, je serre plus fort les doigts de maman, ma façon de lui dire combien, je l’aime et je pense alors fort sincèrement que si c’est çà la mort, alors je meurs sans peur… j’ignore bien sûr à cet instant précis que je ne vais pas mourir et que le plus dur, comme toujours reste à venir…

Publicité
Publicité
Commentaires
Créations autour de Julien
Publicité
Derniers commentaires
Publicité