LES 9 ARTS (6)

LES 9 ARTS (6)

6ème art – la poésie : avant de découvrir Baudelaire, je croyais que la poésie était faite d’images romantiques, de clairs de lune et de mandolines, de douceur et d’enchantement, quelque chose comme un tableau de Watteau. Et puis, un jour, je suis tombée sur ça :

« Les mouches bourdonnaient sur ce ventre putride,
D’où sortaient de noirs bataillons
De larves, qui coulaient comme un épais liquide
Le long de ces vivants haillons. »
(Ch. Baudelaire, Une charogne)

D’un coup, j’ai basculé dans un univers à la Goya ou à la Jérôme Bosch où la laideur devenait sublime.

La première frayeur passée, le premier dégoût surmonté, j’ai compris qu’en poésie, le sujet importe peu, on n’a pas besoin de « faire joli », il n’y a aucune obligation de mener le lecteur aux portes d’un rêve bleu. On peut voyager dans le cauchemar ou la banalité, c’est le génie de l’artiste qui change le regard sur les choses, qui donne cette force et cette impulsion aux mots, cet indéfinissable qui transforme la réalité brute en une vision inspirée.

L’équivalent de la poésie chez Julien, ce serait cet « inexplicable » qu’il dégage, même dans les gestes les plus simples, dans l’harmonie d’une seule note, et qui suscite chez nous des sentiments sur lesquels nous ne pouvons pas mettre de mots. Le poésie émane de Julien comme une aura luminescente, une poésie qui n’a rien à faire des clairs de lune elle non plus, ni des oiseaux lyres dans les feuillages, ni des ciels pastels sur des lacs argentés. C’est une poésie à la Lautréamont, à la Rimbaud, elle est violente et forte, bigarrée et capiteuse, elle vous prend à la gorge, au corps, au cœur et vous étreint entre ses bras puissants. Et l’on s’y abandonne, sans nulle envie de se débattre.